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Le blues climatique des blogueurs voyages par Guillaume Cromer

Je continue la série sur le tourisme durable avec un invité engagé et parfois même enragé. Cette fois-ci, ce sont les blogueurs voyage qui sont dans le collimateur de Guillaume !

J’ai rencontré Guillaume sur Twitter il y a quelques mois. J’avais été très surprise par l’une de ses vidéos qui met en relation le tourisme et les courants migratoires. Un sujet très rarement abordé qui m’a beaucoup touché. La grande humanité que j’ai perçu chez Guillaume m’a donné envie d’en savoir plus sur lui.
Et force est de constater que nous avons des points communs, notamment sur les effets du tourisme sur le climat, sur le développement des territoires … même si Guillaume est bien plus avancé dans ses réflexions que moi et bien plus engagé.
Normal, le garçon est notamment président de l’association ATD, les acteurs du tourisme durable. Nous échangeons régulièrement et ses articles, ses interventions, ses vidéos m’apprennent beaucoup.

Ce jour-là, nous discutions à nouveau de l’impact de l’avion sur le climat et notamment de l’utilisation de celui-ci par les blogueurs voyage.
Je lui ai alors proposé de prendre la parole sur mon blog, il a accepté sans hésiter. Comme Guillaume a un côté très politiquement incorrect, l’idée de son grain de sel sur le blog me plaisait bien 🙂

Ses propos suivants sont très cashs et je sais d'ores et déjà qu'ils vont déplaire.
Ils me déplaisent également rassurez-vous et je me sens autant visée par le sniper Guillaume que chacun d'entre vous pourra l'être :)
Pour autant, ses propos sont intéressants et certainement vont-ils dans le bon sens, celui de la protection de la planète, qui s'embarrasse peu malheureusement de chacune de nos envies.

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Les blogueurs voyage, tous coupables ?

Je n’avais jamais lu autant de réflexions sur l’environnement et sur le climat dans les bilans 2018 des blogueurs et leurs perspectives 2019. Mais que se passe-t-il du côté des influenceurs ?! Vous avez mal à la tête à force de recevoir des critiques sur le fait que vous voyagez trop ? Que vous prenez trop l’avion ? Est-ce que c’est encore une question de jalousie (je te clashe parce j’aimerais TROOOP avoir la même vie que toi…) ou y’a-t-il vraiment un déclic, une réflexion profonde autour de ce satané climat qui se dérègle ?

A en croire les justifications que je lis ça et là, ça vous touche quand même tout ça, au-delà des critiques plus ou moins acceptables… Beaucoup d’entre vous se justifient et cherchent à montrer que le voyage a d’autres vertus, économiques, sociales, interculturels, que des entreprises et des destinations se bougent pour rendre le tourisme plus responsable. Certains vont plus loin et prennent même des décisions, des engagements pour 2019. « Moins mais mieux ! », « Plus aucun vol en Europe ! », « Je vais compenser mes émissions ! » ou encore les ambitions « #StayGrounded ».

Mais alors, que se passe-t-il ?

De mon côté, en tant que professionnel du secteur, consultant, en veille régulière sur ces sujets et président de l’association Acteurs du Tourisme Durable, je prends toujours un plaisir à décrypter les signaux faibles autour de ce sujet. Et là, j’en vois clairement un !

Bon, je ne vais pas refaire un tour d’horizon de la situation climatique mais bon, c’est la grosse merde. En fait, il suffit de lire les tweets de Donald Trump sur la question. Plus ils sont ridicules, plus il y a urgence… Et sur ces derniers messages, je trouve que l’on a atteint un haut, très haut niveau. Autant dire que l’urgence est plus que là et elle est confirmée par les alertes répétées des scientifiques aux quatre coins du monde. On parle de plus en plus régulièrement de l’effondrement systémique de la civilisation quand même ! Ce n’est pas comme s’il s’agissait d’un petit rhume pour la planète Terre.

Bien sûr, les professionnels du tourisme vous diront toujours qu’ils s’engagent, qu’ils vont vers des certifications environnementales et qu’ils enclenchent des démarches de RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise). Mais le problème, c’est le nombre ! On est de plus en plus à vouloir voyager un maximum et je ne parle pas que de chez nous en France et dans les pays développés mais aussi dans tous les pays qui commencent à avoir accès à des congés payés et à un pouvoir d’achat suffisant pour découvrir le monde.

Résultat : Une croissance folle du tourisme internationale. +6% encore en 2018 par rapport à 2017. Des prévisions de l’Organisation Mondiale du Tourisme qui ont éclaté les compteurs avec 2 ans d’avance. On est à 1,4 milliards de touristes internationaux en 2018. Et l’association IATA sur le transport aérien prévoit un doublement du nombre de passagers dans les avions d’ici à 2037 pour atteindre 8.2 milliards de personne…

Et l’avion, oui, ça impacte énormément ! C’est énorme. Quand on sait qu’un habitant sur la planète ne devrait consommer que 2 tonnes par an pour toutes ces consommations et qu’un vol Paris – Bali en A/R, ça fait… 2 tonnes ! Merde, on a un problème !

Aujourd’hui, tout le monde dit qu’il faut faire de vrais efforts, radicaux, pour inverser la courbe du climat.

Mais, alors, pourquoi continuons-nous de prendre l’avion comme on prenait le bus avant… Pourquoi on fait passer notre plaisir et notre confort de loisirs avant la préservation de notre terrain de jeu ?!

Oui, je vous culpabilise là, je sais.

[bctt tweet= »Je l’ai déjà dit ailleurs mais une personne qui prend l’avion une fois par mois ne peut pas se dire écologiste !  » via= »no »]

Non ! Alors, oui, il faut changer. Vraiment changer !

Mais alors, on fait quoi ?!

Oh, bien sûr, mon message ne va pas plaire à tout le monde et il ne va clairement pas dans le sens des envies des nouvelles générations (quand je discute avec mes étudiants par exemple…) ou de celles des pays émergents.

Et bien, il faut faire son deuil.

Faire son deuil de certaines destinations que l’on ne verra pas tout de suite ou même jamais. Il faut préserver son capital carbone et consommer en toute sobriété. Il faut absolument intégrer ce paramètre dans sa consommation de tous les jours, dans chaque choix que nous faisons. Ne regardons pas uniquement le prix. C’est un leurre. J’ai l’impression de voir un individu avec des œillères qui ne voit que le bon plan de Voyages Pirates devant lui sans voir les conséquences environnementales que ce voyage va engendrer.

Bien sûr, faire ce(s) deuil(s), c’est un sacré travail car nous ne sommes pas nés, nous, Génération Y et Z, avec ce genre de privation. On veut avoir accès aux choses, le plus vite possible, en toute facilité, pour un kiff rapide… comme les likes sur Instagram.

Génération de l’instantanéité.

Mais il va falloir déconstruire tout ça.

[bctt tweet= »L’envie de l’Ailleurs, ça commence en bas de chez soi.  » via= »no »]

On n’a pas besoin de partir à l’autre bout du monde pour se dépayser l’esprit et vivre une aventure. Quand on devient végétarien, on a l’impression qu’on va toujours manger la même chose : des soupes, des pâtes et des salades. Or, c’est là où l’on devient créatif en cuisine… On cherche de nouvelles idées, de nouvelles recettes. On sort de sa zone de confort.
Quand on décide de prendre moins l’avion, c’est la même chose, on pense qu’on va se faire chier mais en fait, c’est le début des plus belles des aventures. On repense les déplacements, les activités. On part de chez soi pour aller bivouaquer comme Alastair Humphreys, l’inventeur anglais des microaventures. Et après, on fait la diagonale du vide à pied comme Mathieu Mouillet… ou on part sur les Chemins noirs de Sylvain Tesson.

Et quand on décide, en toute conscience et en toute responsabilité, de repartir loin en avion. Ce ne sera pas juste une consommation lambda mais un vrai régal, avec l’ensemble de vos sens et de vos chakras ouverts ! Ça vous fera le même effet que votre premier grand voyage, quand vous étiez petits et que vous aviez les yeux grands ouverts à chaque instant, quand vos poils se hérissaient à chaque bruit. Vous retrouverez enfin cet état de pleine conscience.

En tant que blogueur voyage, la sincérité du message est de ta responsabilité !

Après, je peux largement comprendre que pour certains blogueurs, c’est votre job et vous vous devez de découvrir des destinations et de faire partager cela à votre communauté. Devez-vous pour autant les inciter à voyager un maximum, de voyager le plus possible pour découvrir le monde ?!

Je pense que c’est là que réside votre responsabilité. Vous devez leur faire comprendre que le voyage a un véritable impact sur le climat et donc sur la qualité de la vie des générations futures sur la Terre. C’est comme le slogan « évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé ».

Trop voyager en avion n’est pas bon pour la santé de la planète.

Et ce serait donc bien que les blogueurs voyage expliquent sincèrement à leur communauté qu’il vaut mieux voyager moins en avion mais mieux et ne pas enchaîner les destinations comme des cases à cocher ou des scratch maps à gratter.

J’espère sincèrement que ce sera un sujet qui sera largement débattu au salon des blogueurs voyage, le #WAT19 cette année par TOUS les acteurs et pas simplement les quelques blogueuses hyper engagées que l’on connaît.

Anticiper un nouveau monde

Après, bien entendu, ça restera le choix individuel de chaque personne, en son âme et conscience. Pour moi, je sais qu’il y a des destinations que je ne ferais pas sur la superbe bucket list que j’avais écrite il y a 10 ans. Trop de destinations chouettes, pas assez de carbone à brûler. Mais ce n’est pas grave, j’ai trouvé d’autres plaisirs et d’autres formes de dépaysement et d’aventures. Moi qui adore faire de la randonnée sur le long court et marcher des jours et des jours à travers montagnes et vallées, le terrain de jeu en France et en Europe est déjà infini. Le bonheur, l’épanouissement et l’émerveillement ne sont pas l’apanage des voyages lointains…

[bctt tweet= »Je pense que nous sommes la génération qui aura eu la chance de voyager le plus, de prendre le plus l’avion et de découvrir le monde.  » via= »no »]

Je ne vois pas trop la prochaine génération avoir cette chance par contrainte climatique, législative ou autre. Les déplacements en avion seront bien plus chers. Les solutions propres n’arriveront pas de sitôt pour une aviation vraiment basse en carbone alors, autant se préparer pour faire des aventures différemment ou… continuons de consommer outrageusement, sans penser à l’après.

A vous de voir. De mon côté, j’ai fait mon choix.

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Si vous voulez suivre les réflexions de Guillaume, je vous invite à le suivre sur Twitter où il est très actif sous le pseudo @GiomCromer et sur son site ID-Tourism.

Je vous avez prévenu, les propos de Guillaume ne manquent pas de faire grincer quelques dents n’est-ce-pas …

Alors, que vous soyez blogueurs voyage ou juste amoureux du monde, êtes-prêts.tes à renoncer à vos déplacements en avion ?

renoncer à prendre l'avion

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